Crise, craintes, révolution, quel avenir pour la Formule 1 ?
- Syphan Richard
- 14 mars 2017
- 5 min de lecture
Baisse des audiences télé, de l'intérêt des fans, moins de spectateurs sur les circuits : la F1 traverse une crise de popularité. La faute, principalement, aux décisions réglementaires prises ces dernières années.
Pour la première fois en six ans, la F1 n’a pas perdu de téléspectateurs la saison dernière. En effet, selon des chiffres officiels publiés par Liberty Média, les audiences télévisées de 2016 sont restées stables à 400 millions de téléspectateurs, comme en 2015.
Par rapport à 2008, année du premier titre de champion du monde de Lewis Hamilton, cela représente néanmoins une baisse d’environ 200 millions de téléspectateurs.
En 2014, 425 millions de personnes ont regardé en moyenne 15 minutes de Grand Prix, ce qui est loin des 600 millions encore devant leur écran en 2009.
A qui la faute ?
Les chaînes payantes et la stratégie de Bernie Ecclestone, propriétaire de Formula One Management, ont déjà été pointées du doigt par le président de la FIA, Jean Todt dans Auto Hebdo en septembre dernier : « quand le promoteur, ce qui est son choix, décide de passer des télévisions gratuites aux chaînes payantes, on sait d’avance que la situation ne sera plus la même. » De plus, l’arrivée d’internet et des réseaux sociaux n’arrange pas la situation car ils offrent des contenus qui concurrencent le spectacle de la F1.
Cette stratégie choisie par la F1 de passer à des chaînes de télévision payantes ces dernières années pour des raisons économiques explique en partie cette importante baisse des audiences télévisées entre 2008 et 2016.
Ces règles qui n’ont pas améliorées la situation
LA F1 a perdu beaucoup d'audience et d'intérêt ces dernières saisons. Cela est dû aux différentes règles qui ont été prises et qui, aujourd’hui, ont tué la F1.
Depuis la saison 2007, il n'y a plus qu'un seul fournisseur de pneus en F1. Ce fut tout d'abord le japonais Bridgestone de 2007 à 2010, puis l'italien Pirelli depuis 2011. Les performances des pneus Pirelli, elles sont critiquées depuis son arrivée. Globalement, on leur reproche de s'user trop vite, de ne pas permettre de suivre la voiture qui précède, et donc de la dépasser, et de parfois exploser à pleine vitesse. Cette règle avait pour objectif principal de réduire les coûts, mais elle a surtout mis fin à une concurrence saine pour le développement et la performance des monoplaces.
Avant le premier Grand Prix de la saison, en Australie, les écuries ont seulement eu droit à huit journées d'essais sur le circuit de Barcelone. C'est quatre de moins que l'année dernière. Durant la saison, les équipes ne peuvent quasiment plus tester sur la piste leurs évolutions, les essais privés ayant été réduits à quatre journées, dont deux consacrées à des jeunes pilotes. Décidée, une fois encore, pour diminuer les coûts de fonctionnement, la réduction des essais favorise clairement l'écurie dominatrice, aujourd'hui Mercedes, hier Red Bull, car ses rivales se voient privées de l'occasion de rattraper leur retard.
Les pénalités à tire-larigot... En 2015, McLaren a reçu un total de 320 places de pénalités sur la grille de départ, pour ses deux pilotes (165 pour Button, 155 pour Alonso). Un chiffre hallucinant, qui a donc souvent forcé les monoplaces anglaises à s'élancer du fond de la grille. Mais certains pilotes, à titre personnel, ont également été pénalisés, le plus souvent pour conduite jugée dangereuse. Ce fut notamment le cas pour Max Verstappen, sanctionné à trois reprises. Des pénalités qui ne les incitent pas à prendre des risques en piste. Consciente du problème, la Commission F1 a demandé aux commissaires de la FIA, présents sur les circuits, d'être moins sévères à l'avenir, afin d'encourager les dépassements.
Le passage au moteur hybride… aura été la grande révolution de la saison 2014. Pour s'offrir une légitimité écologique, la F1 est passée à l'hybride. Fini le V8 2,4l, place au V6 1,6l turbo intégré dans une chaîne hybride très sophistiquée avec deux systèmes de récupération d'énergie. Tellement sophistiquée d'ailleurs, que certains motoristes ont rencontré beaucoup de difficultés lors de la phase de développement. Si Mercedes s'en est très bien sortie, et surfe sur cet avantage depuis trois saisons, Ferrari, mais surtout Renault, souffrent d'un déficit de puissance et de vitesse. L'hybridation de la F1 a clairement profité au constructeur allemand, et ses adversaires tentent tant bien que mal de rattraper leur retard. Qui plus est, le bruit produit par les monoplaces a considérablement diminué, contribuant à l'affaiblissement de l'enthousiasme des fans.
En 2010, la FIA a pris la décision d'interdire les ravitaillements en course. Les voitures devaient donc s'élancer avec la quantité d'essence nécessaire pour la totalité de la course. Ce choix a avant tout été dicté par des impératifs financiers, afin de réduire les coûts de transport de carburant, et pour inciter les constructeurs à travailler sur l'économie d'essence. Il était aussi question de sécurité dans les stands. Cette interdiction n'a pas franchement ravi les pilotes, qui craignaient que le Grand Prix se joue dès les qualifications. Et on ne peut pas leur donner totalement tort. Certes, ils s'arrêtent toujours aux stands aujourd'hui pour changer de pneus, mais les ravitaillements en course offraient la possibilité de tenter des stratégies différentes, et ils évitaient que les pilotes passent l'ensemble du GP à surveiller leur consommation, comme ils le font désormais. D'ailleurs, leur retour est à l'étude pour années à venir.
La révolution 2017, une bonne solution ?

Cette année, le monde de la F1 va connaître une révolution. Le règlement 2017 est considéré comme le "plus grand changement" en F1 depuis 20 ans. Que donnera ce nouveau règlement ? C’est le changement dont tout le monde parle. La F1 va vivre l'un des plus grands changements de son histoire. Les monoplaces vont devenir plus larges, leurs ailerons avant auront une forme de pointe, leurs ailerons arrières seront plus bas et plus larges, les pneus seront plus larges et plus endurants, les déflecteurs vont faire leur retour... Le but est clair, augmenter les appuis aérodynamiques et donc les performances.
L'objectif devrait être atteint sans problème. Les équipes évoquent un gain de trois à cinq secondes au tour. Pour les pilotes, les monoplaces seront plus physiques en raison des forces plus élevées en courbe. Mais pour le spectateur et le téléspectateur, ces changements seront-ils bénéfiques ? Pas sûr… Selon Lewis Hamilton. Les nouvelles règles imposées en 2017 "vont rendre les dépassements en course compliqués" et cette évolution "va dans le mauvais sens" : La mise en garde du Britannique est partagée par beaucoup d’acteurs et observateurs de la Formule 1.
Davantage de spectacle ?
Les distances de freinage plus courtes et la perte de performance derrière une autre voiture en ligne droite ne faciliteront pas la tâche pour doubler.
"Cela va forcer à être davantage prudent et les dépassements seront moins fréquents", assure Felipe Massa (Williams). "Et comme il y aura aussi moins d'espace de manœuvre sur les circuits avec la largeur des voitures, on peut s'attendre au début à plus d'accrochages."
Pour Sergio Pérez, pilote chez Force India, "être plus rapide ne veut pas dire qu'il y aura davantage de spectacle". De plus, grâce au travail de Pirelli, "il y aura moins de dégradation des pneus", qui occasionnait souvent des dépassements en fin de course.
"Si le seul changement c'est qu'on se suive à plus grande vitesse sans se dépasser, on ne sera pas très avancé", juge le Mexicain.
Le nouveau propriétaire des droits commerciaux de la F1, le groupe américain Liberty Media, observe la situation de près, car le but de ces nouvelles réglementations est de relancer l'intérêt d'une discipline qui a perdu environ un tiers de ses spectateurs et téléspectateurs en cinq ans. Cette saison sera donc un vrai test pour observer si cela améliore ou aggrave la situation.
Rendez-vous le 26 Mars à Melboune pour le premier Grand Prix qui nous en dira plus sur la nouvelle ère de la F1.
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